Que l’on songe aux nombreuses collaborations de peintres, plasticiens et architectes à des créations scéniques depuis le début du XXe siècle, ou aux œuvres plastiques inspirées des arts vivants parmi lesquelles le Petit Cirque de Calder ou les Théâtres optiques de Pierrick Sorin, ces arts vivants couvrant eux-mêmes un champ très vaste (théâtres lyriques et dramatiques, concerts, arts du cirque, danse, et performance), sans oublier les hybridations multiples et très diverses avec l’image fixe et animée, la démonstration du magnétisme de la scénographie, attirant à elle tant de pratiques artistiques n’est plus à faire. Dialoguant avec les lieux dans lesquels elles s’inscrivent, ou les construisant de toute pièce, ces œuvres intéressent aussi l’architecture.
La diversité des lieux d’enseignement de la scénographie et ses multiples terrains d’application pratique rendent celle-ci parfois illisible, insaisissable. Les publications récentes sur le sujet, évoquant une « scénographie élargie », convoquant les notions de dispositifs, d’expérience ou d’immersion, reflètent cette diversité des points de vue qui a pu motiver a contrario des resserrements inattendus sur les arts de la scène. Nous éprouvons aujourd’hui autant de difficultés à saisir la diversité de ces hybridations et porosités qu’à produire du discours à leur sujet. Pourtant, les œuvres conçues pour la scène, par leur échelle restreinte, leur temporalité resserrée, leur ancrage sur une dramaturgie, offrent un terrain propice à une analyse des processus de conception de ces espaces et des effets produits sur leur réception.
L’objectif de ce cours sera donc à la fois de recenser et analyser ces œuvres et de définir les enjeux théoriques susceptibles d’être développés à partir de ce corpus. Nous nous focaliserons sur les scénographies conçues pour la scène par des artistes plasticiens des XXe-XXIe siècles afin de limiter notre champ d’études mais aussi de cibler des réalisations induisant un dialogue particulier entre champs artistiques. Par ce cours, les étudiants sont autant invités à élargir leurs connaissances qu’à acquérir sinon fabriquer des outils critiques visant à saisir les relations entre création et réception. Car quelle que soit la définition ou le terrain d’application choisi, la scénographie est avant tout une production adressée à un récepteur, spectateur, visiteur ou participant, autant de statuts que l’hypothèse d’une « scénographie élargie » permet de déplier et d’ordonner.