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  • S8-P2 PROJET ARCHITECTURAL ET URBAIN

DE 4 : Figures du possible #2 - Julien Broussart, David Dottelonde

Semestre 8

Enseignant(s) : David Dottelonde, Julien Broussart

  • Année : 4
  • Semestre : 8
  • E.C.T.S : 13
  • Coefficient : 5,00
  • Compensable : non
  • Stage : non
  • Session de rattrapage : non
  • Mode : option
  • Affilié à un groupe : non

Objectifs pédagogiques

'Mutations'

Architecture critique / forme manifeste

Introduction : trois engagements préalables à tout projet

 

1. L’architecture est une discipline critique par essence. Sa pratique engage à penser, concevoir et matérialiser des alternatives, pas à reproduire des conditions existantes. Un projet d’architecture se confronte toujours à un état actuel et vise, d’une manière ou d’une autre, à le transformer. Nous soutenons qu’il y a toujours autre chose à faire que ce qui est déjà fait.

 

2. L’architecture est une discipline dissensuelle. Elle n’a pas vocation à mettre tout le monde d’accord. Au contraire, elle poursuit l’objectif polémique de remettre en question ce qui, jusqu’ici, passait pour une évidence inquestionnable. Nous soutenons qu’un projet est doublement radical : il va à la racine du sujet qu’il explore, et il se positionne sans concession par rapport à ce sujet.

 

3. L’architecture est une discipline qui se pense en se faisant et qui se fait en se pensant. Il n’y a pas de séparation entre théorie et pratique dans le projet : il s’agit d’un même processus. Une architecture n’est pas dissociable de son mode de représentation. Nous soutenons qu’un projet engage une relation dialectique entre le fond et la forme ; le fond influence la forme et la forme influence le fond.

 

En bref, nous soutenons qu’un projet d’architecture doit nécessairement :

• porter un regard critique sur la situation ;

• prendre une position manifeste ;

• développer une forme expérimentale.

 

Il n’est pas nécessaire de s’étendre sur les conditions actuelles de notre planète. Il suffit de dire que les crises environnementale, sociale, politique et économique sont corrélées et s’alimentent mutuellement. Notre monde est en cours de destruction, et cette destruction ne cessera pas d’elle-même. Face à cette situation, l’architecture est plus que jamais nécessaire : elle est la seule discipline capable de penser ces crises comme un tout et la seule capable de matérialiser des alternatives globales par le projet.

 

Notre pédagogie a donc pour ambition de confronter les étudiant·es aux conditions complexes et contradictoires de la pratique architecturale contemporaine, pour développer, avec eux, les moyens de nous en émanciper. Il nous faudra faire avec le monde tel qu’il est, et pourtant faire autrement que ce qui est déjà fait. Notre proposition envisage pour cela deux axes privilégiés sur lesquels pourront se fonder les réflexions des étudiant·es.

- une critique par l’usage (axe 1) ;

- une critique par la mise en œuvre (axe 2).

Contenu

Méthode et modalités de l’enseignement :

 

Comment, concrètement, engager une réflexion sur les rapports entre architecture et modes de production au sein des ENSA, et quoi cela peut-il constituer une pédagogie ?

 

Soulignons d’abord que l’architecture, comme l’ensemble des autres disciplines d’ailleurs, est nécessairement soumise aux conditions de production de son temps. On ne peut penser qu’à partir des structures intellectuelles propre à notre époque, et on ne peut construire qu’à partir des connaissances techniques et scientifiques de notre époque également. Cependant, et c’est là le point crucial, nous émettons l’hypothèse que l’architecture dispose de la capacité d’influer en retour sur ces mêmes structures et connaissances, c’est-à-dire sur l’appareil productif au sens large. À travers la puissance de sa matérialité, une architecture exprime autant une époque qu’elle construit les bases de l’époque suivante.

 

L’exemple le plus parlant de ce pouvoir transformateur, est sans doute la fameuse cuisine de Francfort, conçue en 1926 par Margarete Schütte-Lihotzky et Ernst May. Ce projet de standardisation du mobilier de cuisine, visait d’abord à en réduire le coût de fabrication et à améliorer l’efficacité des tâches ménagères. Nos cuisines contemporaines, à travers le monde, suivent désormais, dans leur immense majorité, les dimensions standards (60x60) définies par ce projet : clairement, l’ensemble de l’appareil de production industrielle de l’électroménager a été bouleversé et refaçonné durablement par un projet d’architecture.

 

Nous savons bien que le système productif contemporain soulève des enjeux urgents et majeurs : pour rappel, le secteur du bâtiment, en France, consomme 45% de l’énergie nationale, et est producteur de 25% des émissions de gaz à effet de serre. Au-delà de ce secteur, les effets de l’exploitation à outrance des ressources naturelles, du réchauffement climatique, des extinctions animales et végétales de masse, de l’explosion des inégalités économiques et sociales et désormais des risques pandémiques, pointent tous vers un même constat : notre système productif n’est pas viable, et il importe de le transformer. Pour quel nouveau système, c’est toute la question. Et c’est autour de cette question que notre pédagogie invite étudiantes et étudiants à réfléchir, à travailler et finalement à y apporter des éléments de réponse par le projet architectural.

 

De la même manière que des projets passés ont eu la capacité de transformer en profondeur le mode de production de leur époque, l’ambition de notre master est de construire sur le long terme, avec les étudiant·es, une collection de projets concrets et réalistes, s’ancrant dans les conditions actuelles, et dont la matérialisation disposerait potentiellement des mêmes capacités de remise en cause et de transformation du mode de production contemporain.

 

 

 

 

Calendrier :

 

Le semestre est divisé en trois temps :

- Un premier temps d’investigation du terrain d’étude commun à tout l’atelier, pour le repérage des sites potentiels d’intervention, l’analyse des édifices qui le constituent, et que l’on envisage de transformer, de compléter. Ce premier temps sera l’occasion d’un travail de relevé, en dessin et en maquette ; et de propositions de stratégies d’interventions à partir de la compréhension des existants.

- Un second temps d’expérimentation et d’élaboration du projet, pour inviter les étudiant.e.s à formuler et tester leurs intentions de projet, pour être à même de les interroger, et de les réajuster. Ce second temps privilégie la manipulation en maquette, le collage et le dessin.

- Enfin un troisième temps de développement et de finalisation du projet, pour l’approfondir et imaginer les principaux détails de mise en œuvre.

 

Chaque séquence se terminera par un rendu intermédiaire, où seront invitées des personnalités extérieures, afin de croiser les regards sur les projets des étudiant.e.s.

 

Les séances encadrées auront lieu le vendredi après-midi

Travaux

Travaux individuels ou en binômes selon le nombre d’étudiant.e.s inscrit.e.s

Documents graphiques, maquettes et textes

Livret de synthèse disponible deux jours avant le rendu intermédiaire et de fin de semestre

Présentation orale et argumentation

Bibliographie

Ouvrages

ALBERTI (Leon Battista), L’art d’édifier, Seuil, Paris, 2004. Texte traduit, présenté et annoté par CAYE (Pierre) et CHOAY (Françoise).

AURELI (Pier Vittorio), Less is enough. Strelka Press, Moscou, 2014.

BANHAM (Reyner), L’architecture de l’environnement bien tempéré, HYX, Orléans, 2011.

CHOAY Françoise, L’allégorie du patrimoine, Paris, Seuil, 1992

CHRIST Emanuel et GANTENBEIN Christoph, Typology II et III, Park books, 2012-2015

DARMON Olivier, Ré:Habiter. Réutiliser, Transformer, Expérimenter, Éditions Gallimard, Paris, 2021

DELLA CASA Francesco, La friche de la Belle de Mai, Actes Sud, l’Impensé, 2013

DEPLAZES Andrea, Construire l’architecture, du matériau brut à l’édifice, Birkhaüser, Berlin, 2008

FEVRE Anne-Marie, CASTANY Laurence, VAN HEEMS François, Le Channel, Actes Sud, janvier 2008

LUCAN Jacques, Composition, non-composition : Architecture et théories, XIX-XXe s., Lausanne, 2009

LUCAN Jacques, Précisions sur un état présent de l’architecture, PPUR, Lausanne, 2015

CORNOZ André, Le territoire comme palimpseste et autres essais, 1983

FROMONOT Françoise, « Manières de classer l’urbanisme », Criticat, n°8, 2011

KOOLHAAS Rem, « What ever happened to urbanism? », S, M, L, XL, 1994

MAROT Sébastien, L’art de la mémoire, le territoire et l’architecture, Éditions de la Villette, Paris, 2010

ROSSI Aldo, L’architecture de la ville, 1966

SECCHI Bernardo, Première leçon d’urbanisme, 2000