En ce XXIe siècle, la ville européenne est_elle vouée à se transformer par l’édification de nouvelles Tours comme image de son renouvellement urbain ? N’est-il pas contradictoire, dans le monde de l’étalement horizontal, de rêver d’accéder à un nouveau type architectural, à l’heure de la transition climatique ? Est-ce l’effet « San Giminiano », ville médiévale italienne dans laquelle les grandes familles de la région ont érigé des tours pour exprimer leur puissance, ou l’effet « Manhattan », symbole de la modernité du XXème siècle ? On peut désormais voir de nombreux projets de tours construites dans les plus grandes capitales d’Europe, comme à Barcelone, Londres, Vienne, Francfort, Malmö… et même à Paris. Cette nouvelle « skyline » de la ville européenne serait le leitmotiv d’une ville « autre », plus « humanisée », qui prendrait de la hauteur pour être durable et compacte, et s’installer sur les seuils de la ville. Il faut densifier pour accueillir les milliers d’habitants à venir, pour rendre les transports plus rapides, moins chers, moins polluants. Densifier pour développer des cités mixtes, ne séparant plus les cités dortoirs des bureaux et des centres historiques. Le « bien vivre en ville » serait le thème récurrent de la Tour au XXIème siècle européen, si celle-ci pouvait être aussi une Tour écologique…
On redécouvre ainsi que, totalement repensées, les tours limitent l’étalement urbain, donnent un avenir à la ville contemporaine, et que la ville basse pourrait bien être une contradiction car elle consommerait énormément de terrain et privatiserait la surface des villes. Que sera Paris demain ? Comment envisager l’évolution de la métropole parisienne au XXIe siècle ? La ville haussmannienne et son gabarit uniforme ne permet pas d’envisager la différenciation nécessaire pour aborder la question de la densité urbaine intramuros. Il s’agit d’envisager dans le Grand Paris, la possibilité d’une extension verticale : c’est l’objectif de la « Cité jardin verticale », en contrepoint d’une réflexion sur une extension horizontale de la ville: il s’agit de proposer une figure urbaine capable de conquérir et d’urbaniser les territoires sans limites de la « citta diffusa » du Grand Paris, dans un équilibre ville/nature indispensable à l’harmonie du développement humain. Densifier, cela ne veut pas dire obligatoirement de proposer une concentration bâtie inhumaine: il faut respecter l’harmonie entre le construit et le non construit, par la présence d’espaces naturels indispensables à l’homme. Sans le poumon de Central Park, Manhattan ne serait pas ce qu’il est. De même que sans ombre, la lumière n’existe pas, sans une proportion de vide, le plein, c’est-à-dire l’espace construit ne peut exister.
« Il devient urgent de se réapproprier le type de la Tour, pour qu’il devienne sujet de réflexions urbaines et architecturales : pour éviter l’effet de mode, le totem médiatique, les grands jouets du type : obélisque, eskimo, piles d’assiettes, recouverts d’écailles ou de bas résilles … Instruments de séduction pour les politiques, fantasme du bâtisseur, ou le rêve d’architecte… » F. Fromonot